L’étude suivante : Le Traité sur la réintégration des êtres, des manuscrits aux éditions comporte deux chapitres importants. Pour en faciliter la lecture, nous l’avons divisée en deux parties, la première présente l’ensemble des manuscrits de ce Traité découverts jusqu’à nos jour et la seconde en présente toutes les éditions.
Étude en hommage à Robert Amadou (1924-2006)
Un document très-secret, circulait de loge en loge [1] La version originale de cet article est parue dans le Bulletin de la Société Martinès de Pasqually (2007, n° 17) ainsi que sur la page internet réservée à la dite société. par copies manuscrites, exclusivement [2] Des Chevaliers Maçons Élus-Coëns de l’Univers, d’abord et comme il se doit, puis au sein de celles des Chevaliers Bienfaisants de la Cité-Sainte, pour connaitre une survivance dans la pratique contemporaine du Rite Écossais Rectifié.. Ce n’était pas un livre destiné à être publié, mais une sorte d’exposé doctrinal, sur une base judéo-chétienne, élaboré par Martinès de Pasqually, thaumaturge et fondateur d’un ordre mystérieux : les Chevaliers Maçons élus coëns de l’univers, rite maçonnique de hauts grades où se mêlent franc-maçonnerie et magie angélique.
C’est à l’aube du XXe siècle que fut publié pour la première fois l’intégralité du Traité [3] Traité sur ou de la réintégration des êtres. A suivre tout au long de cet article, nous écrirons simplement Traité lorsque nous le convoquerons de façon générique. par Henri Chacornac, en 1899 très exactement. Précédemment, il n’y eu que des extraits « saucissonnés » au gré de l’humeur ou du devoir de réserve : Jacques Matter, quelques lignes en 1862, quatre ans plus tard, Adolphe Frank publia 26 feuillets [4] Traité sur ou de la réintégration des êtres. A suivre tout au long de cet article, nous écrirons simplement Traité lorsque nous le convoquerons de façon générique. du même ouvrage pour aboutir à celui de Chacornac, ou de préférence, celle que l’histoire retient sous le nom « d’Édition Philippon [5] Philippon,René, Directeur de la Bibliothèque Rosicrucienne aux éditions Chacornac. Il n’aimait guère Papus, qui semble-t-il, le lui a bien rendu ! René Philippon était également associé à Pierre Dujols, qui tenait la fameuse Libraire du Merveilleux. Il était initié à la Loge Athanor N° 7 (Golden Dawn) au domicile des époux Mathers, 1 avenue Duquesnne, au 7° arrondissement de Paris. », nous y reviendrons.
Mais avançons avec ordre. Précédant l’édition, privilégions les manuscrits !
Sommaire
I – Les manuscrits
Vigilance ! Nous attirons l’attention du lecteur sur l’existence de deux versions du Traité, répertoriées longue (A) et courte (B) par un historien du martinisme, donc de Martinès de Pasqually en premier et de Louis-Claude de Saint Martin en particulier, Robert Amadou [6] Amadou, Robert, 1924-2006, homme de lettres, historien, chercheur, conférencier, docteur ès-lettres et sciences humaines (Saint-Martin, le martinisme) docteur en Ethnologie (Paris 7, Ethnologie) docteur en théologie et prêtre orthodoxe (syriaque). Membre d’Honneur de la Société Martinès de Pasqually.. Celui-ci ne manquera pas de nous accompagner tout au long de cet article. Car avec lui, toute l’histoire moderne de notre Traité a été bouleversée, j’écrirai même métamorphosée tant les découvertes furent abondantes et riches
Il a existé un document manuscrit originel, bien qu’il soit peu vraisemblable qu’il ait été écrit de la main même de Martinès de Pasqually, mais plutôt dicté [7] Paradoxalement, ce sont les défauts typiques de Martinès de Pasqually qui font preuve ( ?) d’une bonne ou défectueuse copie du Traité : formulations particulières, orthographe-phonétique, etc.. S’agissait-t-il simplement d’un synopsis, de notes, de réflexions, tout l’art du maître étant de diriger la confection, laissant à son secrétaire l’habileté de rédiger sous son contrôle ? Saura-t-on jamais ! Mais nous connaissons le véritable titre que lui a donné Martinès de Pasqually dès 1770 : La Réintégration et la réconciliation de tout être spirituel avec ses premières vertus, force et puissance dans la jouissance personnelle dont tout être jouira distinctement en la présence du Créateur [8] Lettre de Martinès de Pasqually à ses adeptes de Paris, en date du 11 juillet 1770, 12° article.. Curieusement, ce fait est rarement rapporté.
L’abbé Fournié, si dévoué qu’il fut, n’avait pas la carrure à imposer au Maître les nécessaires corrections à sa dictée. Nous le savons, Martinès de Pasqually parlait un français avec un fort accent [9] Lettre de Martinès de Pasqually à ses adeptes de Paris, en date du 11 juillet 1770, 12° article. qui pouvait prêter à confusion [10] Cette assertion ne doit pas pour autant cautionner la légende d’un Martinès de Pasqually comprenant et parlant mal le français. Michelle Nahon, Présidente de la Société Martinès de Pasqually me fait très justement remarquer, à titre d’exemple, le style de sa lettre à Jean Baptiste Willermoz, en date du 19 Septembre 1767. Voir pages 77 à 80, Tome second de la biographie de van Rinjberk (voir Bibliographie). d’où les nombreux barbarismes, fautes d’orthographe et de ponctuation, lapsus, voire de méprises phonétiques par l’abbé. Considérons sans l’affirmer qu’il est probablement le rédacteur de la version B (la courte). C’est la version qui a circulé le plus dans les loges. C’est aussi le texte le plus sûr car il offre une propriété particulière : il est de toutes les copies, y compris celle du Fonds Z, et pour cause, la version la plus proche de la pensée « brute » de Martinès. L’on voit mal Fournié oser intervenir !
Assurément, ce n’est pas le cas de son collègue puis successeur. Excellent écrivain, exigeant, le Philosophe Inconnu possédait l’entregent, l’habileté diplomatique inhérente à son éducation, pour intervenir avec prudence et courtoisie. Il en résulte un texte plus long, la version A, souvent plus explicite, sans pour autant lever toutes les obscurités, loin s’en faut ! Corollaire, selon Robert Amadou, le texte le plus apprêté n’est assurément pas le plus parfait, quel paradoxe ! Mais c’est le meilleur, nous le verrons.
Ce qui est avéré n’est plus discutable : Saint-Martin dans sa lettre du 4 mars 1771 à Willermoz indique que « cet ouvrage important à été commencé par le Maître pour l’avancement de ses disciples. Le prix est fixé à cinquante écus couvrant le salaire des travaux du Maître et l’entretien d’un secrétaire chargé de faire toutes les copies ». Le fait que Saint-Martin ne se désigne pas lui-même comme ce secrétaire ne permet pas pour autant de « s’autoriser à penser, ou de déduire » qu’il ne l’est pas ! Bien au contraire : un mois plus tôt, il a quitté l’armée, s’est mis à temps plein, à la disposition de Martinès de Pasqually… L’indication inverse de Willermoz, datant de 1821, au seul bénéfice de de Grainville et Champoléon nous semble suspecte, car produite par un homme avancé en âge, aigri et rancunier à l’encontre du Philosophe Inconnu.
L’écrit confidentiel on l’a vu et compris, ne fut jamais édité et se transmettait donc au Réaux-Croix par copie. Aussi, n’évoquerons nous ci-après que celles attestées par de solides garanties, ayant fait l’objet d’observations, d’études, et pour leur majorité, de leur conservation. Aux fins de simplifier une situation déjà bien confuse, nous garderons l’ordre adopté (jusqu’au sixième) par Robert Amadou. [11] Introduction à l’édition dite « du Bicentenaire », infra note 12.
1. Le manuscrit Matter
Du manuscrit qui gouverna la recherche de Matter, Frank puis Philippon, il ne reste hélas que le souvenir. De son origine d’abord, rien d’autre que la déclaration de son inventeur, Matter : « Une rare bonne fortune a fait tomber entre mes mains, dans un voyage à l’étranger, les deux petits volumes [12] C’est bien entendu de reliures dont il s’agit, la première liasse contenant cinq parties et deux dans la seconde. Toutes ces précisions sont données par Matter dans l’ouvrage précité à la note 5. Cela est à noter, car bien des historiens et non des moindres, ont écrit et répété que Matter était en possession de deux manuscrits ! du traité de don Martinez ». Matter nous précise que l’ensemble « forme environ (sic) 355 pages d’une écriture assez serrée ». Au moins avons-nous ainsi la certitude qu’en ayant fait l’acquisition, il n’en a pas reçu héritage de Frédéric Salzmann. Contrairement à ce qui a été affirmé et repris par de nombreux biographes, Jacques Matter n’est pas le petit-fils de Frédéric Salzman. Ce dernier est le grand-père ( branche maternelle) de son épouse Marie, née Goguel. Il n’y a donc aucun lien de parenté. Nous remercions Jean-Louis Boutin pour cette précision qui nous permet de mettre fin à une longue série de méprises.
Le manuscrit a été réduit en cendres durant la seconde guerre mondiale. Entre-temps, Gérard van Rijnberk l’a consulté puisqu’il publie sur 16 pages [13] Pages 59 à 74 dans Un thaumaturge au 18° siècle, Martinès de Pasqually tome 1. une étude comparative entre cette version et le manuscrit Kloss que nous allons bientôt examiner. Ce fait sera relaté avec davantage de développement dans la seconde partie de l’étude.
2. Le manuscrit référencé S.O. Th. 18
Un second Traité est identifié dans un fonds d’archives privées maçonnique, à Genève, dans le fonds des archives du Grand Prieuré Indépendant d’Helvétie, soit l’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité-Sainte. Il se présente en deux volumes, au format 18×23 cm, respectivement de 206 et 248 pages. L’écriture révèle qu’il est l’ouvrage d’un seul copiste, « tracé d’une petite écriture régulière, fin du dix-huitième siècle, ou plus probablement début du vingtième » [14] Amadou, Robert, Introduction à l’édition dite « du Bicentenaire », pages 11 à 57 Traité de la réintégration. . Au total, 454 pages.
3. Le manuscrit référencé S.O. Th. 19
Le troisième, situé au même fonds que le précédent, est reconnu comme « une copie d’après l’exemplaire du Traité venu de Saint-Martin à Joseph Gilbert (1769-1841). Copie partielle en l’état »[15] Ibid. ? Il s’organise en cinq cahiers brochés, au format de 20×22 cm. Deux copistes ont cette fois exécuté. Mention particulière sur la couverture, « Propriété de l’Ordre des Grands Profès de Genève ». [16] Ibid. Joseph Gilbert, héritier de Louis-Claude de Saint-Martin l’a offert à son ami le capitaine Cunliffe Owen en 1839, lequel l’offrit au Collège métropolitain des Grand-Profès. Matter en prit connaissance et le confronta à son propre exemplaire. Détail pour la petite histoire, un titre différent, un de plus, sur la reliure : Traité sur la Réintégration des Êtres dans leurs premières prérogatives : vertu et Puissance spirituelle divine.
4. Le Manuscrit Letourneur, référencé L.T.
Quelques confidences sur cet exemplaire cité par Robert Amadou dans son introduction à l’édition du Bicentenaire, mais bien davantage dans le développement qu’il nous offre dans une étude spéciale [17] Amadou, Robert, pages 37 à 57 dans le Trésor Martiniste.. Volume in-8°, un seul mot de titre sur le dos de la reliure cuir, Traité. Copiste inconnu mais unique, 489 pages.
De l’enquête menée par les historiens spécialisés, il ressort une seule certitude, il ne peut s’agir de Türkheim. Mais est-ce l’exemplaire cité par Gérard van Rinjberk, provenant de l’élu coën de Raimond ?
Ce n’est pas une copie de copie comme, on le verra, le manuscrit Kloss. Il appartient à la famille A, version longue très proche du Manuscrit Matter [18] Fidèle à ses habitudes, Robert Amadou a dressé un tableau des variantes entre les deux manuscrits, voir page 44 et suivantes, infra Trésor Martiniste., et se trouve mutilé des pages 51 à 52.
Son parcours est rocambolesque : on le découvre publiquement dans le catalogue du libraire Durel en Novembre 1877, sous le numéro 3634 ; puis on le retrouve répertorié dans la bibliothèque du couvent des Capucins minimes de Lyon mais… oublié lors du déménagement de cette dernière vers 1927. Récupéré (au poids du papier, merveilleuse époque ! ) par le libraire Ebrard, quai Fulchiron (toujours à Lyon) il est vendu à un descendant de Jean-Baptiste Willermoz. Après la seconde guerre mondiale, celui-ci le cédera – manifestement sans état d’âme car il ne s’agit pas de l’exemplaire de son aïeul – au Libraire parisien Marcel Dommergues. C’est alors qu’aux alentours de 1950, Robert Letourneur en fit la bienheureuse acquisition. Probablement dans années 70, il s’en dessaisit sans que nous puissions le localiser
5. Le manuscrit Kloss, référencé L 2
L’original de cette copie du Traité est patent : C’est celui du prince Christian de Hesse, cédé par Carl Friedrich Tieman, un ami de Saint-Martin. Selon Van Rijnberk, il se présenterait sous forme d’un volume de 360 pages, in-8° et relié plein cuir. Scripteur non certifié, possiblement le strasbourgeois Jean Frédéric Kuhn [19] Amadou, Robert, incline pour « un copiste professionnel et obscur » mais au principal défaut de rester anonyme. qui aurait exécuté cette version à Bordeaux même, où il résidait alors. Puis en 1830, à la mort du prince, transmis à Andreas Schleiermacher. Original ? Non, c’était forcément déjà une copie. À la mort de Schleiermacher, en 1858, il est classé dans les archives du Grand-Duc, puis la trace s’est abîmée. Heureusement, le Docteur Georges Kloss l’ayant emprunté en 1848 à Schleiermacher, en exécuta ou fit exécuter une copie. Le manuscrit Kloss est donc une copie de copie… Encartés, de nombreux ajouts de la main de George Kloss [20] Kloss, Georges, médecin, historien et Grand-Profès du R.E.R. (Introduction, tables, etc.). Propriété actuelle du Grand-Orient des Pays-Bas, à La Haye. 86 feuillets au format 25×34 cm. divisé en trois parties, planche hors-texte traçant le Tableau Universel.
6. Le fragment de Solesmes
Il s’agit d’une compilation des 26 derniers chapitres de la version courte, référencée B) de la main du petit-cousin de Saint-Martin, Tournyer. C’est donc et encore, une copie de copie. Il montre de nombreux points de conjonction et même de complément avec le manuscrit Kloss, mais sans que les deux rassemblés en produisent la somme. Sa dénomination officielle est très exactement Suite du Grand Traité. Nous le nommerons à l’avenir, de préférence, Le fragment de Solesmes.
Une communication récente de Catherine Amadou nous invite à nuancer notre propos :
« Ce sont les §§ 259 à 284 – qui manquent chez Kloss – de la version B et ils ont été publiés (Renaissance traditionnelle, 101/102, avril 95, 47-69). »
Provoquons une pause.
En effet, avant d’évoquer le manuscrit numéro 7, avertissons de quelques exemplaires dont on a prétendu l’existence sans pour autant l’attester formellement et perdu tous témoignages, ce qui les rend d’autant plus suspects. Mais en la matière, l’histoire de celui qui va suivre doit nous inspirer la prudence, de même maintenir l’espérance de probables découvertes.
Rapidement, appelons puis congédions :
- Un manuscrit qui aurait été en possession d’un ecclésiastique de Genève, de Joux [21] Page 57 dans Un thaumaturge au 18e siècle, Martinès de Pasqually, tome 1.. Celui-ci prétendait être possesseur, dans les années 1810, de « tous les manuscrits de Martinès » !
- Un exemplaire du comte de Divonne, évoqué dans une correspondance de von Baader [22] Ibid. . S’il a existé, il aura été détruit avec tous les papiers personnels du comte. Ou se pourrait-il qu’en 1998… nous verrons plus loin !
Plus sérieusement car nécessairement :
- les exemplaires de Grainville, de Champoléon.
- De même qu’advint-il de celui de Willermoz (1730-1824) ? Qu’il ne faut pas confondre avec le manuscrit Letourneur qui on l’a vu, n’a fait son entrée dans la famille du dernier acheteur qu’après une date que l’on peut situer aux alentours de 1930 !
Enfin, là, l’affaire est référencée [23] Fabry, Jacques, décline une thèse intéressante : Le Bernois Friedrich Herbort et l’ésotérisme chrétien en Suisse romantique, où il développe entre autres, une série de mini-biographies dont celle du marquis de Vaucrose. Sur ce dernier, méfions nous des reprises sans vérifications qui font de lui soit un chevalier, soit un comte alors qu’il fut bien marquis, de même pour son grade, une fois capitaine, une autre fois lieutenant-colonel !, qu’est-il advenu de l’exemplaire du marquis de Vaucroze, disciple de Dom Pernety, l’illustre inspirateur des Illuminés d’Avignon. Son ami Herbort [24] Herbort, Friedrich, 1764-1833. Ce théosophe bernois, admirateur de Kirchberger, écrivit en autres, le Compensium hermenium., dans une lettre adressée à Meyer, donne une première précision très importante : « Ce chevalier (sic) de Vaucrose a été l’ami intime de Saint-Martin et il lui succède dans la traduction de J. Böhme en assurant celle du Mysterium magnum ». En 1819, il informe Saltzmann « J’ai fait, depuis quelques années, des connaissances très intéressantes, entre autres avec un comte (sic) français, ancien officier de cavalerie et chevalier de Saint-Louis, un chercheur zélé des hautes vérités, très aimable et très estimable : il m’a procuré le rare manuscrit de Dom Martinez de Pasqually, qu’un de mes amis à copié. Il est curieux et a son importance, mais je ne tiens pas le tout pour exacte vérité » [25] Joly, Alice, p. 316 indique que « Le marquis de Vaucroze possédait déjà des documents concernant les quatre premiers grades de Pascally et même le Traité de la Réintégration».. Ainsi donc Vaucrose possédait une copie du Traité, lequel a été à son tour recopié par un ami d’Herbort.
7. Le manuscrit de Saint-Martin, fonds Z
1978 ! Mil-neuf-cent-soixante dix-huit demeurera dans les annales pour tous les martinistes – qu’ils soient de cœur, d’appartenance à un ordre martiniste ou franc-maçon (en particulier du R.E.R, Ordre Cohen ou Coën ), historiens, chercheurs et universitaires – 1978 donc, restera comme l’année d’une découverte inestimable et toujours à explorer (faute d’en connaître tous les éléments recensés), celle du Fonds Z. L’invention de ce « Trésor Martiniste » est due à l’inlassable Robert Amadou, nous allions écrire « comme à l’habitude » ! Mais il faut se contenter des livraisons et confidences de l’inventeur, lui accorder notre confiance : nulle pièce n’est accessible, donc consultable.
Nous ne pouvons donc l’étudier, dans le cadre de cet article. Non point que cela s’alignerait hors sujet, mais simplement parce que nous considérons qu’il ne nous revient pas légitimement de le faire, en outre, nous serions incompétent pour y prétendre. Souhaitons qu’une belle âme termine la tâche, car bien des éléments restent encore à se faire connaître publiquement.
Fixons raisonnablement nos bornes à le décrire.
L’immense vertu qu’il produit et qui le fait surpasser les six versions précédemment présentées, c’est qu’il est de la main même, intégralement, de Louis-Claude de Saint-Martin, devenu au départ de l’abbé Fournié en 1771, l’unique secrétaire de Martinès de Pasqually ! C’est donc, sinon l’original improbable, un document source.
Comment se présente-t-il ? Il est extrait du premier tome des neuf [26. Belle reliure plein cuir, exécutée fin XIXe ou début XXe, par le propriétaire ( ?) de l’époque.] qui rassemblent la collection des Manuscrits réservés du Philosophe Inconnu soit le Fonds Z.
La partie ainsi sauvegardée du Traité sur la Réintégration des Êtres dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle essence divine est constituée par 116 pages de format 22 par 24 centimètres, réparties sur 5 cahiers, intégralement autographe de Saint-Martin on l’a vu, recto et verso, comprenant à la suite du texte, le « Récit d’une expérience » et une planche hors-texte représentant « la Figure Universelle ». De même, une « Note de lecture » qui l’on s’en doute est postérieure !
Le papier est filigrané, mystérieuse coïncidence (?) « Saint-Martin » ! Saint-Martin y apporta de sa main quelques rectifications et mentions en marge, mais réprouvons sévèrement les ajouts de trois anonymes et sacrilèges corrigeurs !
Observons, pour terminer, que le « Manuscrit de Saint-Martin » se révèle fort cousin germain du « Manuscrit Letourneur » (y compris l’explicit, l’expérience, la figure, mais aussi et surtout la variante du titre, Traité sur la Réintégration etc.). De là à conclure hardiment qu’ils proviennent de la même matrice… De même les S.O. 18 & 19.
8. L’inconnu d’outre-Rhin, ou le revenant de Divonne ?
La rumeur a couru, puis la confirmation est tombée : En Allemagne, lors d’une vente organisée par Zisska & Kistner à Munich, les 6 et 7 novembre 1998, un exemplaire du Traité (inscrit sous le numéro 6523) a été acquis par la Bibliotheca Philosophica Hermetica pour sa collection privée [26] En 2002, Le Bulletin de la Société Martinès de Pasqually a publié dans son numéro 12, la reproduction de la première page de ce Traité. dont nous donnons ici un extrait., où il est référencé Ms M388. Le copiste est ignoré, la provenance inconnue. Mais les précieuses notes en marge sont de la main de Franz von Baader, ce que le Prof. Antoine Faivre a bien voulu confirmer à Alain Marchiset.
Interrogé, l’actuel propriétaire nous renseigne sur le nombre de pages soit 98 (ce qui le rangerait dans la version courte) et précise avec des réserves, l’ajout en allemand de notes attribuées à Franz von Baader. Souvenons-nous de l’hypothétique exemplaire de Divonne, signalé par von Baader justement… Se pourrait-il qu’il ait survécu à la destruction des ses archives ?
Jusqu’à présent, le manuscrit Kloss était le seul exemplaire connu de la version B. De nouveau, Catherine Amadou a bien voulu nous apporter la précision suivante :
« le catalogue de vente annonce 107 ff. ; la BPH nous indiquait jadis 211 p. (puisque le catalogage comprend uniquement les pages comportant du texte). En tout cas le texte s’arrête avec le § 229, comme le ms. Kloss, et c’est pour cela que le ms. de Solesmes est important, puisqu’il va aussi loin que la version A. Maintenant il nous faut trouver les §§ 230 à 258 » !
L’on pourra suggérer, sans trop nous avancer, qu’une livraison de douze copies ait été faite au minimum. Douze est en effet le chiffre annoncé par Le Forestier, de Réau-croix ordinés, qui ne pouvaient pas ne pas avoir reçu un exemplaire du Traité [27] Le Forestier, René dans La Franc-Maçonnerie occultiste au XVIIIe siècle et l’ordre des Élus Coëns, Paris, Dorbon, 1928, note 3 page 534). . A ce chiffre, il faut bien entendu ajouter les copies de copies citées dans notre article. Réjouissons-nous des découvertes à venir !
9. Le manuscrit Gaudard
Grâce à la précieuse découverte de Jean-Louis Boutin, l’évocation d’un manuscrit « venant de Mr. de St-Martin », nous annonce l’anonyme sieur D. dans sa lettre du 25 septembre 1851 à J. de Saint-Genois, Professeur-Bibliothécaire à l’Université, Rédacteur à la revue Messager des Sciences Historiques des arts et de la Bibliographie de Belgique. Il indique avoir eu entre les mains (en-t-il devenu propriétaire ou simple consultant ?) « Un manuscrit aux apparences modestes mais dont le titre suffisait pour exciter vivement ma curiosité […] cahier in-4° de 149 pages, d’une écriture serrée, régulière et très lisible ».
Il nous livre, outre le titre « Traitté (sic) sur la réintégration des Etres, dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle divine, par Dom Martinetz Pasqualis, Venant de Mr. de St.-Martin », une précision absolument capitale, puisqu’elle l’identifie : « Commencé la copie le 19 juillet et fini le 14 août 1818. F. Gandard [sic pour Gaudard] colonel, à Vevey en Suisse ». Sur ce personnage et cette copie, voir l’étude fournie par Dominique Clairembault sur ce site : « Une référence au Traité sur la réintégration en 1851 ».
Dans sa lettre, figure deux extraits qui mettent en lumière nombre de différences, d’omissions par rapport au manuscrit de Louis-Claude de Saint-Martin qui nous font douter – personnellement, mais la parole est aux historiens – qu’il s’agisse de celui qui nous fait référence dorénavant, le 7 précédemment évoqué, du Fonds Z. A remarquer d’ailleurs que la copie Gaudard fait mention de la fameuse note : « L’auteur n’a pas été plus loin dans ce traité qui devait être beaucoup plus long ; c’est surtout à la venue du Christ qu’il devait être le plus important, selon ce qu’il a dit lui-même à ses amis. »
Localisé à cette date, qu’est-il devenu ? Une piste à fouiller, assurément ! L’affaire s’annonce difficile, car toute trace est perdue tant à l’Université de Gand qu’à la maison communale. Deux incendies ont ravagé la bibliothèque et les archives de l’Université, le premier pendant la dernière guerre mondiale, le second en 1995 ! De même pour les archives municipales entre 1944 et 1945…
10. Le manuscrit Delard de Rigoulière
Grâce à l’invention généreuse de Mariette Cyvard, découvrons ce manuscrit déposé en 1930 ou 1931 aux archives départementales du Lot et Garonne, à Agen, par le marquis de Fayolle (1851-1933, membre de la Société Française d’Archéologie), en provenance directe de la famille Delard de Rigoulières, laquelle est apparentée aux Raffin d’Hauterives, aux Lusignan. Seule une étude généalogique sérieuse permettrait d’établir un lien formel avec Jean-Jacques Du Roy d’Hauterive. L’on peut en douter et écarter cette piste : dans l’arbre généalogique de cette famille, publié par Robert Amadou dans les numéros 16 & 17/1997 de L’Esprit des choses, l’on peut vérifier que la branche Raffin d’Hauterives n’y figure pas. C’est à partir de la génération du père de Jean-Jacques, Henri Du Roy de Fontenailles, que le patronyme Du Roy est suivi d’une désignation de seigneurerie. Ainsi Du Roy de Villiers, Du Roy de Vinhais, Du Roy de Blicquy, Quand à Jean-Jacques, il avait abandonné ses droits sur le titre et sur le château.
Une hypothèse de travail propose que le copiste soit l’Abbé Fournier. Affaire à suivre !
Une hypothèse de travail, avancée par Alain Marchiset propose que le copiste soit l’Abbé Fournier. Une autre, soutenue par Michelle Nahon, avance le nom du baron de Calvimont. Affaire à suivre !
Relevons son intitulé précis : Traité sur la réintégration des êtres créés, dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle divine, au singulier, à l’identique des manuscrits S.O. ou de l’exemplaire de Louis-Claude de Saint-Martin, sauf pour le mot créés.
L’examen (réduit) des deux documents obtenus nous fait observer :
- Qu’à partir de la page 66, les suivantes ont disparues (arrachées ?).
- Anomalie dans la pagination, par étourderie sans doute du réceptionnaire qui ayant obtenu cette copie en deux envois, a numéroté 1 à 14 puis 13 à 64.
- Qu’ainsi, ce fragment du Traité s’interrompt au parricide de Kaïn par son fils Booz, ce qui correspond exactement au chapitre 77 à la page 152 de l’édition faite par Robert Amadou à la Diffusion Rosicrucienne (1995).
- Ecriture fine, élégante, élégante, très typée. Le copiste est très certainement l’abbé Fournié, selon Alain Marchiset, qui a procédé à un examen graphologique, et fait confirmer l’expertise par son confrère Thierry Bodin, expert en autographe.
- Le texte débute sur la version originale (pages impaires) de l’édition du bicentenaire, mais bien vite, s’en détache singulièrement.
11. Le manuscrit de la BnF, NAF 22373
Chez nous, en France et à Paris ! Ne gâchons pas notre plaisir, même cocardier.
Le onzième manuscrit du Traité sur la réintégration des êtres exhumé ! Sur une information de Mariette Cyvard (récidiviste éclairé) qui a relevé l’existence de ce document mentionnée dans l’ouvrage : Nouvelles acquisitions du département des manuscrits de la Bibliothèque nationale, 1913-1914 (Bibliothèque de l’École des Chartes, année 1915, volume 76, numéro 1, p. 400), de H. Omont. À partir de ces données, Dominique Clairembault et Xavier Cuvelier-Roy sont remontés à la source, le premier s’étant rendu sur place.
L’examen in situ, le 30 janvier 2010 à la BnF, a permis la validation de cette information. Le document est bien archivé sous la cote NAF 22373 (et microfilmé sous la référence MF 21257). Il est incorporé dans un volume relié regroupant plusieurs manuscrits sous le titre général de Mélanges historiques et philosophiques [28] Le volume, Mélanges historiques et philosophiques se compose des textes suivants : Fol. 1. « Traité sur la réintégration des estres dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle divine. » — Fol. 103. Mémoire relatif à la Ligue. — Fol. 117. « Des fondemens de l’Estat et des moyens de régner, traduit d’italien en françois. » — Fol. 130 v°. « Le héros, traduit de l’espagnol de Balthasar Gratian, par le P. Courbeville. » — Fol. 133. « Pour servir à l’histoire des négociations depuis le traité de Risvick jusqu’à la paix d’Utrecht. » — Fol. 136 v°. « Différentes anecdotes tirées des lettres du cardinal Dodda. » — Fol. 163. « De la prudence humaine. » — Fol. 188. « Liber continens tabulas de systemate mundi, ex libris Sanctae Catharinae Parisiensis. ». XVIIe et XVIIIe s. Pap. 222 feuillets, montés in-fol. Demi-rel. Le Traité sur la réintégration des êtres [et non pas estres] dans leur première propriété, vertu et puissance spirituelle figure en tête de ce volume.
En voici les caractéristiques principales :
Le Traité occupe les 102 premiers folios de ce volume, soit les pages 1 à 205. Le texte est le même que celui du manuscrit autographe de Louis-Claude de Saint-Martin. Il s’agit donc du Traité dans sa version longue, pour reprendre la typologie de Robert Amadou. Comme ce dernier, il s’achève avec le récit sur Saül et la Pytonisse. Il ne comporte pas la note indiquant que « L’auteur n’a pas été plus loin dans ce traité… » placée à la fin du manuscrit de Saint-Martin. De même, « L’expérience pour convaincre de la vérité de l’axe feu central », est absente. Rappelons ce que texte est barré sur le manuscrit autographe de Saint-Martin et qu’il est possible qu’il n’appartienne pas à ce texte.
Une première étude du Traité figurant à la BnF, permet d’apporter les remarques suivantes :
On trouve plusieurs corrections signalées en marge par une # qui montrent que le texte a été relu après sa rédaction [29] Par exemple, p. 31, marque dans la marge avec un # signalant une correction faite dans le texte dont un mot est rayé et remplacé au dessus par sa correction ; p. 36, ajout dans la marge d’un passage oublié : « je vous préviens, leur dit-il… ». L’attention du relecteur n’a cependant pas remarqué, page 41, l’oubli du paragraphe sur les nombres, texte figurant à la page 67 du manuscrit de Saint-Martin (§ 66 de l’édition typographiée de ce texte). Il est possible que ce texte ait été absent de la version utilisée par le copiste.
Plusieurs copistes semblent avoir travaillé sur ce document, car on remarque trois, voire quatre écritures différentes [30] A partir de la page 49, les lettres « d » sont caractéristiques avec une courbe allongée vers le haut à gauche. Avec la page 97, une nouvelle écriture, très régulière et bien lisible, fait son apparition et enfin, à partir de la page 145, on retrouve la graphie du deuxième copiste, à moins qu’il ne s’agisse d’un quatrième..
Le schéma du Tableau universel figure après la page 159, c’est-à-dire au milieu du « Grand discours de Moïse », juste avant la description de ce dessin. Cette position semble plus logique que celle adoptée dans le manuscrit de Saint-Martin, qui le place au début du discours (entre les pages 136 et 137, ce qui correspond au § 215 de l’édition typographiée de ce texte).
Le grand cercle qui commence dans le « cercle dénaire » et descend pour entourer la « création universelle » se fond dans sa partie basse avec le cercle de la création universelle. La légende « Immensité de l’axe feu incréé » est au dessous de ces deux cercles fusionnés alors que sur le dessin du manuscrit de Saint-Martin elle est entre les cercles, sachant que dans cette version les cercles ne se mélangent pas.
Dans le « triangle terrestre » figure une légende qui n’est pas sur le dessin de Saint-Martin. En effet, au-dessus des lettres hébraïques on peut lire « ame [sic pour âme] terrestre ». La légende « Immensité céleste », absente sur le schéma de Saint-Martin, figure ici de chaque côté du « cercle de saturne ». La ligne verticale reliant le centre du « cercle dénaire » au « triangle terrestre » est bien tracée, alors qu’elle est invisible sur le dessin de Saint-Martin. En dehors de ces différences les deux dessins sont très ressemblants et pourraient presque être superposés.
Aucune indication ne permet de connaître l’origine de ce document, pas plus que le nom de son propriétaire ou commanditaire. Deux notes, l’une figurant en tête du manuscrit et l’autre à la fin et comportant une signature pourraient sans doute nous en apprendre davantage. Hélas, nous n’avons pas encore réussi à les décrypter.
La présence de deux tampons nous permet de dater approximativement ce document de l’époque impériale. Il s’agit des tampons de la « Bibliothèque Royale » et de la « Bibliothèque Impériale ». Après la Révolution, la Bibliothèque de la Nation devient Bibliothèque Impériale sous Napoléon pour prendre le nom de Bibliothèque Royale avec le retour de la royauté. Quoiqu’il en soit, le manuscrit du Traité semble avoir quitté les fonds de la bibliothèque étant donné qu’il n’entre dans les collections de la BnF qu’entre 1913 et 1914, à la suite d’une acquisition [31] Omont, H. de, Nouvelles acquisitions du département des manuscrits de la Bibliothèque nationale, 1913-1914,(Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, année 1915, volume 76, numéro 1, p. 400..
Conclusion : Le manuscrit du Traité de Martines de Pasqually conservé à la Bibliothèque nationale est très complet et l’on peut s’étonner que personne jusqu’à ce jour n’ait remarqué l’existence de ce document. Très proche de la version du manuscrit autographe du Philosophe inconnu et malgré quelques défauts, il s’agit d’une très belle copie du célèbre texte de Martinès de Pasqually.
Une remarque préliminaire sur les trois ms suivants :
Les manuscrits ci-dessous ont été découverts en mai 2010 par Alain Marchiset, libraire-expert à Paris (L’Intersigne). Ils viennent des archives de La Loge des Amis-Réunis (Philalèthes, Savalette de Lange) renfermant celles des Élus Coën. Avec le souci de l’authentification et de la précision (notamment en matière d’expertise graphologique) il a présenté en avant première, ces trois manuscrits au Colloque du Tricentenaire de Martinès de Pasqually tenu à Marseille les 18 et 19 septembre 2010.
12. Le manuscrit (de Saint-Martin ?), fonds G.O.
L’impensable est peut-être arrivé, une second manuscrit du Traité, serait de la main de Louis-Claude de Saint-Martin et datant de la fin des années 1770 (effectivement, le papier ayant postérieurement servi à sa reliure, date lui de 1780) ! Parions que cette découverte va éveiller bien d’autres espoirs !
Sa récente invention par Alain Marchiset provient de l’exhumation en mai 2010, d’une partie des archives de la loge des Amis-Réunis (voir ci-dessus).
Il semble être une copie de travail ou d’essai, inachevée, tant sont nombreuses les ratures et corrections qu’effectua Saint-Martin à partir de la version originale. En outre, l’on notera l’absence du Tableau universel, de la note sur l’expérience et prend fin au § 229 selon la numérotation proposée par Robert Amadou et qui désormais sert de référence.
Il fait désormais partie des fonds de la bibliothèque du Grand Orient de France (Paris).
13. Le manuscrit de Virieu, fonds G.L.N.F.
Manuscrit de la main du comte François-Henri de Virieu (1754-1793), membre du Rite Écossais Rectifié. Sa récente invention par Alain Marchiset provient de la découverte en mai 2010, d’une partie des archives de La Loge des Amis-Réunis (voir ci-dessus).
Ce manuscrit fait désormais partie des fonds de la bibliothèque de la Grande Loge Nationale Française (Paris).
14. Fragment Wukassovich, fonds G.O.
Jean Wukassovich, majordome à Saint-Pétersbourg Philalèthes et membre de La Loge des Amis Réunis. Il exécute cette copie dans le début des années 1780.
Sa récente invention par Alain Marchiset provient de la découverte en mai 2010, d’une partie des archives de La Loge des Amis-Réunis (voir ci-dessus).
Il est composé de deux cahiers, titrés « 4.1.2.3.4. », le premier correspondant aux § 241 à 258 (selon la numérotation proposée par Robert Amadou) et le second aux § 259 à 284. Il comprend la « note de fin ».
Remarque intéressante, ce deuxième cahier est donc identique à celui précédemment étudié au numéro 6 dit Le Fragment de Solesmes (version courte, référencée B de la main du petit-cousin de Saint-Martin, Tournyer) et manquants chez Kloss !
Ce fragment-manuscrit fait désormais partie des fonds de la bibliothèque du Grand Orient de France (Paris).
15. Le manuscrit de Cahors
Le rêve de tout chercheur, mais l’impossible n’est pas français : une simple visite en fin d’après-midi au salon du livre de Cahors, et c’est la découverte de plusieurs cahiers dont le titre ne laisse aucun doute :Traité sur la Réintégration des Etres créés dans leurs premières propriétés Vertus Et Puissances Spirituelles divines !
Provenant semble-t-il des archives d’un château bordelais (le vendeur se refusant à donner davantage de précisions) ce Traité se présente sous la forme d’un « volume en quarto, cousu par petits livrets, à l’écriture lisible et régulière tout au long du manuscrit » nous confie Michelle Nahon, Présidente de la Société Martinès de Pasqually, qui a eu le bonheur de le consulter et de le photographier (hélas dans de trop mauvaises conditions).
175 feuilles, recto-verso, papier filigrané datant de la seconde moitié du 18e siècle, avec un dessin inédit, car fort différent de celui généralement observé (celui représentant le signe planétaire à la naissance d’Enoch).
Similaire au manuscrit Kloss, version B donc, seules 3 pages semblent manquer, le texte se terminant par « puissante vertu par les… » soit à la fin de la page 400 de notre ouvrage de référence, l’édition de Robert Amadou à la Diffusion Rosicrucienne de 1995.
Autre caractéristique remarquable, le titre identique à celui de Matter, mais avec l’ajout de « créés ».
Pas de Tableau Universel semble-t-il.
Souhaitons que l’heureux inventeur de ce manuscrit, Patrick Blanc, le rende accessible aux chercheurs.
16. Le manuscrit Prunelle de Lierre
C’est avec une certaine émotion que l’on découvre dans le numéro 168 de la revue Renaissance Traditionnelle, paru en mars 2013, l’invention d’un seizième manuscrit par… Catherine Amadou !
On savait que la bibliothèque municipale de Grenoble conservait des trésors. En novembre 2012, Dominique Clairembault révélait l’existence de nombreux manuscrits, demeurés jusqu’ici inconnus, dans le fonds Prunelle de Lière ( Les manuscrits oubliés du Philosophe inconnu : le fonds Prunelle de Lière à Grenoble). Il s’étonnait alors de l’absence du Traité parmi ces documents. Or, quelques mois après la publication de son article, le voici exhumé. C’est finalement dans le fonds Joseph Flandrin qu’il sommeillait depuis 1906, date à laquelle ce célèbre collectionneur en fit don à la bibliothèque municipale de Grenoble (N° 195851, cote R 8018).
L’intérêt majeur de cet exemplaire (outre l’identité de son propriétaire originel, Léonard-Joseph Prunelle de Lierre, qui fut avec Joseph Gilbert l’un des derniers « compagnons », du Philosophe Inconnu) est qu’il s’agit très probablement d’une copie réalisée à partir du manuscrit autographe de Louis-Claude de Saint-Martin (voir le n° 7 ci-dessus). Son titre s’en distingue pourtant : Traité sur la réintégration des êtres dans leurs propriétés, vertu et puissance première spirituelle divine.
Il s’agit de la version A, contenant le Nota et l’Explicit, l’Expérience mais le Tableau Universel est absent.
Enfin, ce Traité inscrit 387 pages, est divisé en 732 paragraphes regroupés par 236 chapitres et une Table de la main de Prunelle de Lierre, lequel est intervenu personnellement dans sa copie à partir de la page 270, le copiste non identifié n’ayant pas terminé sa tâche.
17. Manuscrit de Jacques Matter
Ce document a été découvert par Catherine Amadou le 9 février 2017 à la bibliothèque de l’Institut protestant de la théologie à Paris (Ap 32.702) [32] Voir « Deux nouveaux manuscrits du Traité sur la Réintégration de Martinès de Pasqually : les manuscrits Matter et Gaudard. Suivi de la liste des dix-sept manuscrits inventés à ce jour », Renaissance Traditionnelle, n° 187-188 (Juillet-Octobre 2017), p. 260-288 .
Il provient de la bibliothèque de Jacques Matter et comporte une note de ce dernier datée du 15 janvier 1862 :
Ce traité du célèbre initiateur de Claude de Saint-Martin est entièrement inédit.
Il est très rare. Je n’en connais que deux exemplaires, outre celui-ci.
L’un appartient à M de N. P. [Noir-Pétillet] de Lausanne ; l’autre au comte d’Ourches à Battignoles. Ce dernier fait partie des manuscrits attribués à Saint-Martin lui-même. J’ai appris à son possesseur actuel le véritable auteur du Traité, en lui recommandant de ne pas en souffrir la publication par une personne incompétente. […] «
Cette version du Traité est divisée en trois volumes reliés (228 x 175) constitués de : 158, 167 et 116 pages. Il débute par une préface de Jean-Pierre Bourgeois. Cette copie du Traité est basée sur la version A. Il se termine par la Nota. L’Explicit est absent tout comme le Tableau Universel.
Notes :