Les animaux n’ont point de doute sur leur être et sur leur loi, qu’en est-il de l’homme nous dit le Philosophe inconnu dans ce texte extrait de L’Homme de désir. Nous lui avons donné ici un titre fictif, car les différentes sections de cet ouvrage ne sont séparées que par des numéros.
Homme, les animaux même n’ont point de doute sur leur être et sur leur loi. Chacun d’eux défend son existence et son caractère individuel, jusqu’à son entière destruction, parce qu’il est plein de l’action qui lui est propre.
Et toi tu as, comme eux, une action vive, par où tu pourrais, à leur exemple, défendre la réalité de ton être ; tu as de plus trois témoins en ton pouvoir, pour étayer le sentiment de ton existence, quand ton action militante est en repos :
Les nombres, qui sont le témoin intellectuel ;
La musique, qui est le témoin sensible ;
Et la géométrie, qui est le témoin matériel.
La géométrie te peut servir à tout rectifier ; les nombres à tout justifier, et la musique à tout vivifier.
Tous ces moyens sont refusés à la bête, dont toutes les preuves se bornent à l’action physique corporelle ; et cependant elle est plus inébranlable et plus juste que toi dans sa loi.
C’est qu’elle n’a pas, comme toi, transposé sa puissance ; c’est que les dominations terrestres ne la captivent pas, comme toi, dans les fausses apparences ; c’est que l’ennemi a ce moyen-là de moins d’exercer sur elle son empire.
Mais aussi tu as au-dessus d’elle le moyen de t’opposer à cet empire de l’ennemi, et d’en anéantir la puissance.
(Extrait de L’Homme de Désir, n° 191)